Beaucoup de travailleurs s’interrogent sur les différentes formes d’indemnisation auxquelles ils ont droit en cas de perte de revenus, qu’elle soit liée à une rupture de contrat de travail ou à un problème de santé. Il est courant de se demander : « Vais-je toucher un montant plus élevé en étant au chômage ou en étant en arrêt maladie ? » En France, les mécanismes de protection sociale sont relativement développés, mais ils obéissent à des règles spécifiques qu’il convient de connaître.
Cet article a pour objectif d’apporter un éclairage détaillé et complet sur la question, en analysant les modalités de calcul, les conditions d’éligibilité, la durée d’indemnisation, les différences de traitement selon la situation familiale, et bien d’autres éléments.
Comparaison des montants perçus selon le salaire
Pour répondre à la question « Gagne-t-on plus au chômage ou en arrêt maladie ? », il est utile de faire quelques simulations chiffrées en prenant des exemples de salaires. Les chiffres mentionnés sont indicatifs et peuvent varier en fonction des réformes, de la situation familiale (nombre d’enfants, etc.) et du fait que l’employeur verse ou non un complément.
Exemple 1 : Salaire de 1 500 € brut mensuels
- Chômage (ARE) :
- Salaire journalier de référence (SJR) approximatif : (1 500 € x 12) / 365 ≈ 49,32 €.
- Selon la formule, l’ARE sera soit 40,4 % du SJR + 12,71 €, soit 57 % du SJR.
- 40,4 % de 49,32 = 19,96 € + 12,71 € = 32,67 € ; 57 % de 49,32 ≈ 28,12 €.
- La formule la plus avantageuse est 32,67 € par jour, soit ≈ 980 € par mois (pour 30 jours).
- Il existe un plancher de l’ARE aux environs de 31 € bruts par jour, ce qui pourrait s’appliquer.
- Arrêt maladie (IJ) :
- Salaire journalier de base : 1 500 € / 30 ≈ 50 € (approche simplifiée).
- IJ = 50 % de 50 € = 25 € par jour, donc ≈ 750 € par mois.
- Si l’employeur ne verse pas de complément, c’est moins avantageux que l’ARE.
- En revanche, si la convention collective prévoit un maintien à 90 % ou 100 % du salaire pendant un mois, alors le salarié percevra entre 1 350 € et 1 500 € pour le premier mois, ce qui est plus élevé que les 980 € de l’ARE.
Dans ce cas précis, l’arrêt maladie peut être plus ou moins intéressant que le chômage selon que l’employeur complète ou non les IJ.
Exemple 2 : Salaire de 2 500 € brut mensuels
- Chômage (ARE) :
- Salaire journalier de référence approximatif : (2 500 x 12) / 365 ≈ 82,19 €.
- 40,4 % de 82,19 = 33,19 € + 12,71 € = 45,90 € ; 57 % de 82,19 ≈ 46,85 €.
- La formule la plus avantageuse est 46,85 € par jour, soit ≈ 1 406 € par mois.
- Arrêt maladie (IJ) :
- Salaire journalier de base approximatif : 2 500 € / 30 = ≈ 83,33 €.
- IJ = 50 % de 83,33 € = 41,67 € par jour, donc environ 1 250 € par mois.
- Avec un maintien de salaire à 90 %, la somme atteint environ 2 250 € ; à 100 %, elle reste 2 500 €. Mais ce maintien total n’est pas systématique et peut être limité dans la durée.
Dans cette configuration, l’ARE est plus élevée (1 406 €) que les IJ seules (1 250 €). Cependant, l’effet d’un complément employeur peut faire largement pencher la balance en faveur de l’arrêt maladie, du moins pendant la période couverte par ce complément.
Exemple 3 : Salaire de 4 000 € brut mensuels
- Chômage (ARE) :
- Salaire journalier de référence approximatif : (4 000 x 12) / 365 ≈ 131,51 €.
- 57 % de 131,51 = 74,96 € ; 40,4 % de 131,51 + 12,71 = 53,16 + 12,71 = 65,87 €.
- Le choix le plus avantageux est 74,96 € par jour, soit ≈ 2 249 € par mois.
- On vérifie que cette somme ne dépasse pas le plafond journalier (autour de 256 €), donc c’est bon.
- Arrêt maladie (IJ) :
- Salaire journalier de base : (4 000 / 30) ≈ 133,33 €.
- IJ = 50 % de 133,33 ≈ 66,67 € par jour, donc ≈ 2 000 € par mois.
- Le complément employeur dépend encore de la convention : s’il porte le total à 90 % ou 100 % du salaire mensuel, alors le salarié peut toucher jusqu’à 3 600 ou 4 000 € selon la période de maintien.
Dans le cas d’un salaire élevé, l’ARE peut s’avérer plus intéressante que la base des IJ seule, qui serait d’environ 2 000 € par mois. Néanmoins, si un salarié bénéficie d’un maintien à 100 % de son salaire pendant au moins un mois, il touchera plus en arrêt maladie (4 000 €) qu’en ARE (2 249 €). Sur la durée, si l’arrêt maladie se prolonge, les règles de maintien de salaire peuvent changer (passer de 100 % à 66 % ou 50 %, etc.).
Les modalités de calcul : focus sur les différences
Base de calcul
Pour l’ARE, la base de calcul est le salaire journalier de référence (SJR), qui comprend la moyenne des rémunérations perçues (souvent primes incluses) sur une période de référence, généralement 12 mois.
Pour les IJ maladie, on se réfère aux salaires bruts des 3 mois (ou 12 mois) précédant l’arrêt. On obtient un salaire journalier de base, puis on applique un pourcentage (50 % ou 66,66 %).
Pourcentage d’indemnisation
- Chômage : entre 40,4 % + 12,71 € et 57 % du SJR, tout en respectant un minimum et un maximum.
- Arrêt maladie : 50 % ou 66,66 % (dans le cas de salariés ayant au moins 3 enfants à partir du 31e jour d’arrêt). Les conventions collectives peuvent augmenter ce taux.
Plafonds
ARE : il existe un plafond journalier de l’ordre de 256 € bruts (chiffre sujet à modification chaque année). Il n’y a pas de plafond de salaire pris en compte pour calculer le SJR, mais le montant final de l’allocation ne peut dépasser ce plafond.
IJ maladie : le plafond d’indemnisation journalière versée par la Sécu est d’environ 50,58 € bruts. Les compléments éventuels de l’employeur s’ajoutent, sans pour autant systématiquement atteindre le salaire habituel.
Durée de versement
ARE : de 24 mois à 36 mois selon l’âge du demandeur. Dans certains cas particuliers (activité partielle, changement d’âge, etc.), cette durée peut être révisée.
IJ maladie : pour une maladie ordinaire, la durée maximale est de 360 jours (12 mois) sur une période de 3 ans. Pour une affection de longue durée (ALD), le droit peut aller jusqu’à 3 ans, mais les conditions sont particulières.
Le rôle essentiel des conventions collectives et des accords d’entreprise
Dans de nombreux secteurs (bâtiment, commerce, banque, industrie, etc.), les conventions collectives ou les accords d’entreprise prévoient des dispositions spécifiques pour :
- Améliorer le taux de maintien de salaire pendant l’arrêt maladie.
- Prolonger la durée de maintien au-delà des minimums légaux.
- Couvrir d’autres aspects comme la prévoyance (invalidité, décès, etc.).
Ces avantages peuvent radicalement changer le montant que l’on perçoit pendant un arrêt maladie, et donc faire en sorte qu’on touche plus qu’au chômage. Dans certains cas, il est même possible que l’employeur propose un complément d’indemnités après la Sécurité sociale, par exemple via un organisme de prévoyance. Il est donc indispensable de consulter sa convention collective et/ou son contrat d’assurance collective pour savoir exactement à quoi on a droit.
Que se passe-t-il si on est en arrêt maladie pendant une période de chômage ?
Il existe des situations où une personne déjà en chômage survient à une maladie qui la rend temporairement inapte à rechercher un emploi. Dans ce cas, elle peut basculer sur des indemnités journalières sous certaines conditions, ou demeurer avec un statut de demandeur d’emploi en maladie. Cela peut affecter le montant perçu, puisqu’on ne peut pas cumuler à 100 % l’ARE et l’IJ.
- Pôle emploi peut suspendre le versement de l’ARE pendant l’arrêt maladie.
- La CPAM prend alors le relais pour verser les IJ si les conditions sont remplies.
- Le montant peut se révéler inférieur à celui de l’ARE.
C’est pourquoi certaines personnes préfèrent, lorsqu’elles tombent malades en étant en recherche d’emploi, continuer à percevoir l’ARE plutôt que d’ouvrir un droit aux IJ, lorsqu’elles n’ont pas de complément. Mais cette pratique soulève des questions de conformité, puisque, pour être indemnisé au chômage, on doit être apte à chercher un emploi. Si la maladie empêche réellement la recherche, la déclaration de l’arrêt est normalement obligatoire.
Trouver la meilleure option selon sa situation
La question « gagne-t-on plus au chômage ou en arrêt maladie ? » n’a pas de réponse universelle car elle dépend de nombreux facteurs :
- Le niveau de salaire avant la perte d’emploi ou l’arrêt maladie.
- La présence ou non d’un complément employeur et l’importance de ce complément.
- La durée de l’arrêt maladie et la nature de la pathologie (arrêt de courte durée ou de longue durée, ALD, etc.).
- L’âge et l’ancienneté du salarié, qui influent sur la durée de droits au chômage et le montant des indemnités.
Le système social français, malgré sa complexité, propose des protections pour les situations de perte d’emploi et d’arrêt maladie. En règle générale, le chômage (ARE) peut rapporter davantage qu’un arrêt maladie si on considère uniquement la part prise en charge par la Sécurité sociale. Toutefois, dans de nombreux cas, les compléments de salaire prévus par les conventions collectives peuvent faire en sorte qu’un salarié en arrêt maladie conserve une rémunération plus proche de son salaire initial, voire équivalente pendant un temps.
En somme, il n’existe pas une réponse unique à la question “Gagne-t-on plus au chômage ou en arrêt maladie ?”. Chaque situation est différente, et la meilleure approche consiste à étudier l’ensemble des paramètres : droits acquis, ancienneté, convention collective, éventuels compléments, durée prévisible de l’arrêt, projets professionnels, etc. Un accompagnement personnalisé (par un organisme syndical, un service de ressources humaines ou un conseiller juridique) peut s’avérer très utile pour calculer précisément ce à quoi on peut prétendre dans un cas ou dans l’autre.